Orlando ou l’impatience
Au Festival d’Avignon, une pièce d’Olivier Py, auteur et metteur en scène. Du 5 au 16 juillet à La Fabrica*
Le propos ? Un jeune homme cherche son père désespérément – enfin comme une théorie du désir, celle de connaître son géniteur inconnu. La forme ? Une traversée dans le monde, dans divers lieux, dans divers milieux. Tout cela est très mélangé, très « folles rencontres ». Et si le héros montre parfois sa désespérance, il reste souvent détaché ou, plutôt, chorégraphié dans une succession d’évènements. Les changements d’espaces scéniques s’appuient sur une sorte de carrousel – structure pivotante très géométrique, très illustrée, très lumineuse parfois.
En préambule de cette représentation d’un théâtre du XXIème siècle, il y eut ce rappel au public des dangers qui couvent sur les moyens techniques et financiers accordés au spectacle vivant. Et de faire entendre par la volonté d’Olivier Py -nouveau patron du festival d’Avignon- dans la jeune salle de La Fabrica, l’Evènement de ce novembre 1848 quand Victor Hugo, monté à la tribune de l’Assemblée constituante, dénonçait « une réduction de budget menaçant les arts, les lettres et les sciences ». Pas d’économie sur l’intelligence est le leitmotiv de son discours. Brader la culture, c’est saboter la gloire de la nation, anéantir l’édifice social, avilir le peuple. Or seul, l’encouragement enthousiaste d’un grand gouvernement peut lutter contre ces dangers. A peine déclaré ouvert depuis 24 heures avec un « Prince de Hombourg » signé Kleist et, ici, mis en scène dans le Palais des Papes par Giogio Barbério Corsetti, le responsable de ce 68ème Festival d’Avignon rappelait donc Hugo pour obliger les autorités politiques à ne pas réduire les moyens financiers de la communauté théâtrale.
Et voilà donc « Orlando ou l’Impatience ». Un nom pas anodin. Virginia Woolf, déjà Son roman « Orlando » (1928) ouvrait les portes de l’identité, du sexe. Le voyage continue avec Py. D’une autre facture, plus directe et libre dans la forme, plus exhibitionniste aussi. C’est ce qu’il souligne en parlant de « pièce systémique », ne ratant rien du mélange des genres et de son exposition.
Ce carrousel tourne, change parfois de structure, de lumière, d’accessoires. Il est comme une horloge à remonter (ou à détraquer) le temps. Et c’est une course façon colin-maillard pour les protagonistes avec, autour de Orlando (Matthieu Dessertine dans le rôle), des fous divers (Jean-Damien Barbin), des pères potentiellement nombreux (Philippe Girard) ou encore « La grande actrice », la mère (excellente Mireille Herbstmeyer), etc… A noter les trois heures et quelque de spectacle -avec entracte. Un peu de fioritures qui disparaîtront sans ternir cette ronde étonnante de la vie.
* A voir aussi en 2015 au Blanc-Mesnil (mars), à l’Espace des Arts, à Chalon sur Saône, au TNP de Villeurbanne, àParis au Théâtre de la Ville, à la Comédie de Genève, au CDDB de Lorient et, en mai 2015, au Festivaal Ruhrfestspiele de Recklinghausen (Allemagne).