Au 1er janvier 2009 est instauré le statut d’auto-entrepreneur, comme le prévoit la loi de modernisation de l’économie. En fait, on peut considérer cette mesure comme une disposition permettant entre autres aux retraités de se constituer des compléments de retraite. Après l’assouplissement des conditions du cumul emploi-retraite autorisant un retraité à améliorer son pouvoir d’achat en poursuivant une activité salariée, le statut d’auto-entrepeneur facilite le développement d’une activité de travailleur indépendant grâce à une simplification des démarches administratives et de la gestion comptable. Pour compenser la baisse programmée du montant des retraites.

Un plafond mensuel de 2000 euros environ…

Avec ce nouveau statut, pas de capital social minimum, pas d’inscription au registre du Commerce ou au registre des métiers. Pour les charges sociales, juste un prélèvement libératoire trimestriel ou mensuel (au choix) calculé sur le chiffre d’affaires (de 12% pour une activité commerciale à 21,3% pour une activité de prestations de services), et une fiscalité établie à partir du chiffre d’affaires (1% à 2,2% suivant l’activité). Pas de TVA, et pas de taxe professionnelle durant les trois premières années.

En revanche, des plafonds d’activité ont été fixés à 80.000 euros de chiffre d’affaires annuel pour les auto-entrepreneurs spécialisés dans la vente de marchandises (ce qui implique la gestion d’un stock), et à 32 000 euros pour les autres. Ainsi, une fois déduit le montant des charges et impôts, il reste dans le premier cas quelque 6.000 euros par mois de recettes qui doivent aussi servir à assurer la rotation du stock, ou 2.000 euros dans le cas d’une prestation n’impliquant pas d’investissements particuliers. C’est à dire, dans tous les cas de figure (et une fois déduits les coûts de fonctionnement pour la vente de marchandises), un maximum de l’ordre de 2.000 euros net par mois.

… pour compenser la baisse des retraites…

Certes, ce statut d’auto-entrepreneur n’est pas réservé aux seuls retraités, mais il est manifestement taillé à leurs mesures. Pour les demandeurs d’emploi et les salariés rémunérés autour du SMIC (1.321 euros brut), ce statut peut aussi présenter un intérêt. Mais ces estimations concernent un plafond d’activité, par définition jamais garanti s’agissant d’une activité libérale. A ce titre, le passage au statut d’auto-entrepreneur présente un risque que beaucoup hésiteront à prendre, surtout si on considère l’absence de filet de sécurité en cas d’échec !
En revanche, pour un jeune retraité, ce statut pourrait être attractif dans le mesure où les revenus tirés de cette activité viendront compléter une pension garantie. Et dans cet esprit, on retrouve la même démarche que celle initiée par le gouvernement pour favoriser le cumul emploi-retraite – avec en perspective une levée progressive des contraintes qui limitaient jusqu’à présent les possibilités de retour à un emploi plus ou moins partiel une fois liquidés les droits à la retraite.

…en repoussant l’âge de cessation d’activité effective

L’avenir du pouvoir d’achat des retraités pose problème. Michel Rocard avait déjà tiré la sonnette d’alarme à la fin du siècle dernier. Et les réformes des systèmes de retraite plus ou moins heureuses menées par Edouard Balladur pour allonger progressivement les durées de cotisation, ou par François Fillon négociant longuement pour introduire des aménagements, ou par Dominique de Villepin tentant de banaliser les régimes spéciaux, n’ont pas réglé les modalités de financement. Le Conseil d’orientation des retraites (COR) note que « les personnes âgées de 65 ans et plus représentaient 16,2 % de la population française au 1er janvier 2007 contre 14,6 % en 1994 et devraient atteindre près de 25 % en 2030. Ce qui représente une charge financière croissante pour les régimes de retraite. »

Ce vieillissement programmé de la population est à l’origine de l’aggravation du problème des retraites : d’après l’Insee dans un rapport de 2006, « le rapport entre le nombre de personnes de 60 ans et plus et le nombre de personnes de 20 à 59 ans passerait d’environ 40% actuellement à près de 55% en 2020 et 70% en 2050 ». Un actif potentiel pour deux retraités au milieu du siècle ! Et les dépenses de retraites passeraient de 12% environ du PIB en 2010 à 14 % en 2020 et près de 16% en 2040 ; soit, par rapport à la situation actuelle, un besoin de financement supplémentaire de 0,2 point de PIB en 2010 à 2 points en 2020 et 4 points en 2040, souligne le COR.

Les choix économiques et, depuis peu, les graves incertitudes sur la croissance nées de la crise, rendent impossible une simple extrapolation du système actuel de retraite par répartition pour assumer cette charge. Face à la difficulté d’engager de plus profondes réformes, le gouvernement anticipe donc une baisse des traitements en mettant en place une série de dispositions pour permettre aux retraités de compenser la baisse de leur pouvoir d’achat. Quitte à repousser l’âge de la cessation réelle d’activité au-delà de l’âge légal de la retraite.

Une retraite par répartition menacée

La nouvelle mesure introduite par le gouvernement Fillon pour autoriser le travail jusqu’à 70 ans va dans le même sens : offrir aux plus de 60 ans des moyens financiers que la retraite par répartition ne pourra plus leur donner. Et pour favoriser des départs plus tardifs, il veut initier de nouvelles conditions de formation continue. C’est une façon plutôt provocante de proposer une solution au problème du pouvoir d’achat des seniors, car la réalité est autre : alors que la moyenne européenne du taux d’emploi des salariés de 55 à 64 ans est de 45% dans l’Union à 15, elle tombe en France à 37%… loin derrière l’Allemagne (48%), le Royaume-Uni (57%). Le problème en France n’est pas de pouvoir prolonger une activité jusqu’à 70 ans, mais de rester en activité jusqu’à 60 ans alors que l’âge moyen de mise en pré-retraite forcée est de 58,5 ans.

Le gouvernement a beau plaider pour un report de l’âge de la retraite, la réalité est bien celle-là : deux salariés sur trois sont remerciés avant 60 ans… et se retrouvent exclus du marché du travail. Dans ces conditions, au-delà du débat sur l’âge légal de la retraite, de nouveaux instruments sont offerts aux jeunes seniors pour se constituer un complément de revenu qui sera de plus en plus nécessaire compte tenu de l’érosion irréversible du taux de remplacement de leur retraite, menaçant le système par répartition. Le statut de l’auto-entrepreneur en fait partie.

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