Après l’évacuation du squat Matignon, Jeudi Noir occupe un immeuble appartenant à Bongo
Lundi 21 février 2011.
Les forces de l’ordre ont repoussé lundi sans ménagement quelques dizaines de militants du collectif Jeudi Noir et du réseau « Sortir du colonialisme », qui tentaient d’occuper un bâtiment à Paris appartenant à l’Etat du Gabon.
Les forces de l’ordre ont pénétré dans les lieux, un ancien hôtel particulier situé 51 rue de l’Université, dans le VIIe arrondissement de Paris, lundi peu avant 13h, a-t-on constaté sur place, pour en déloger de façon musclée une dizaine de militants qui avaient escaladé le mur d’enceinte à l’aide d’une échelle.
Une vingtaine d’autres militants, qui se trouvaient devant la porte, ont également été repoussés, notamment à l’aide d’une bombe lacrymogène.
Les manifestants entendaient dénoncer les « biens mal acquis ».
Cette action de Jeudi Noir et de « Sortir du colonialisme » intervient alors que le président Nicolas Sarkozy reçoit lundi son homologue gabonais Ali Bongo Ondimba.
En début d’après-midi, les manifestants étaient toujours sur place, dans la rue, encerclés par un important dispositif policier. « Bien mal acquis, pouvoir mal acquis, Ali Ben Bongo dégage! », pouvait-on lire sur une banderole déployée par les manifestants.Vendredi 18 février 2011
Le vendredi 18 février 2011 à 7 heures 20, la police, sans respecter la fin de la trêve hivernale, a forcé les portes d’entrée de l’immeuble Axa occupé par Jeudi Noir « à coups de burin, alors que nous étions enchainés aux grilles », raconte Ophélie Latil, une des membres du collectif.
C’était hélas la suite logique de la visite de l’huissier, venu la veille présenter un commandement à quitter les lieux. Les CRS avaient ensuite interdit l’accès de l’immeuble aux élus, notamment à la parlementaire européenne, Karima Delli, qui voulait dormir sur place. Un conseiller régional, Sylvain Desmet, a quant à lui passé la nuit installé dans un duvet sur le trottoir de l’avenue Matignon, en soutien aux occupants.
Les militants qui s’étaient barricadés n’ont ensuite opposé qu’une résistance passive aux forces de l’ordre, certains s’étant réfugiés un moment sur les toits pour ralentir les opérations.
Vidéo de l’évacuation A 9h30, les Jeudi Noir étaient embarqués au commissariat du 11e arrondissement. Ils ont tous été relâchés au bout d’une heure après un simple contrôle d’identité, ont confirmé la préfecture de police. Résultat des courses ? 2000 m2 en plein Paris est à nouveau vide, comme depuis 4 ans. 20 jeunes précaires parmi les 3,6 millions de mal logés en France (cf. le dernier rapport de la fondation Abbé Pierre) se retrouvent à la rue…
L’après-midi, les squatteurs et leurs soutiens sont retrouvés devant le siège d’Axa pour une « dépendaison de crémaillère ». Champagne et cotillons étaient au programme, devant une haie de CRS. L’occasion pour Simon Cottin-Marx de faire le point : L’assureur Axa qui a hier annoncé des bénéfices à la hauteur de 4,3 milliards d’euros pour l’année 2010 a préféré nous faire expulser, plutôt que d’envisager de transformer un immeuble vide en logements sociaux. Mais n’avons pas dit notre dernier mot. Nous continuerons à nous battre pour obtenir une vraie politique du logement dans ce pays. Des élus de gauche mais aussi de droite commencent à nous soutenir, et Jeudi Noir vous annonce qu’il pendra bientôt une nouvelle crémaillère ! Ce ne sont pas les locaux vacants qui manquent à Paris. »
Jeudi 17 février 2011.
Les habitants du 22 avenue Matignon « sont toujours retranchés sur place, barricadés pour empêcher l’expulsion imminente. Ou au moins la rendre plus difficile que celle survenue à la fin du moins d’octobre 2010 quand ils ont été expulsés de la place des Vosges à 1 semaine de la trêve hivernale » » indique un communiqué du collectif jeudi noir.
Même expulsé de l’avenue Matignon, « Jeudi Noir continuera à se mobiliser pour dénoncer la contre politique du logement menée par le gouvernement » a conclu le communiqué.
Mercredi 16 février,
Bertrand Delanoë, maire de Paris, a tenu à témoigner son soutien à l’action menée par
Jeudi Noir, qui, en occupant un immeuble vide avenue Matignon, met en évidence le
problème du mal logement et de la pénurie de logements en Île-de-France, qui touche
particulièrement les jeunes et les étudiants.
Il regrette une décision de justice pouvant conduire à une expulsion immédiate, ainsi que
l’absence d’accord qui aurait permis de mettre en place une convention d’occupation
provisoire en attendant que soient réglées les difficultés techniques et juridiques
empêchant la remise sur le marché de cet immeuble.
La Ville de Paris s’engage fortement dans le domaine du logement, avec, notamment,
entre 2008 et 2014, un objectif de production de 40 000 logements sociaux dont 4 000
logements étudiants et 3 000 places en foyers pour jeunes travailleurs.
Enfin, le maire de Paris rappelle sa volonté de voir mises en oeuvre des dispositions
réglementaires et fiscales de nature à favoriser la transformation d’immeubles de bureaux
obsolètes ou durablement vacants situés dans le coeur de la métropole parisienne en
logements.
Rappel Journée du mardi 15 février. Quelques jours à peine après le vote de la loi Loppsi 2, le rendu du jugement du tribunal d’instance concernant l’occupation de l’immeuble Axa par Jeudi noir était tombé.
Il tenait en un mot : Expulsion. La décision a donc été prise, une fois de plus, de privilégier le droit de propriété au droit du logement opposable. Ce jugement entérine le fait que loger 30 jeunes et précaires dans un bâtiment vide depuis plusieurs années est donc préjudiciable à l’ordre public…
Les occupants du 22 avenue Matignon ne se faisaient pas d’illusions. Après une veillée d’armes festive et une nuit assez courte, ils avaient convié la presse, les élus et les amis à un rassemblement de soutien en fin d’après-midi. Les forces de l’ordre qui exercent un véritable blocus depuis le 27 décembre et interdisent l’entrée du bâtiment à la presse comme aux denrées de première nécessité, se sont déployées devant les portes vitrées.
Là où sont affichés comme un ultime pied de nez, les portraits hilares des habitants et des militants de Jeudi Noir ainsi que ceux de leurs soutiens médiatico-politiques. A 21 heures, le plus dur est passé pour les occupants. C’est la trêve nocturne, jusqu’au lendemain 6 heures du matin, où l’expulsion par la force redevient possible…
Hasard malencontreux du calendrier, c’est aujourd’hui que Libération.fr a décidé de ne plus héberger le blog « ministère de la crise du logement » qu’animait Jeudi Noir. Cette reprise en main de l’information sur les luttes des mal logés serait-elle liée à l’arrivée de Nicolas Demorand ? On n’ose y croire. Quoi qu’il en soit, on attend avec impatience l’ouverture d’un nouveau blog sur rue 89 ou Mediapart.