La Maison des métallos, à la croisée des chemins
Symbole du combat syndical pendant de nombreuses années, la Maison des métallos devient, sous l’impulsion de la Mairie de Paris, un lieu de vie culturelle et associative en plein cœur d’un quartier populaire de Paris.
Ce reportage a été réalisé dans le cadre d’une formation dispensée par Place Publique le 17 juin 2003 sur ce mode de traitement.
Il a été publié dans Politis n° 772 (semaine du 23 au 29 octobre 2003).
Belleville, quartier populaire et métissé de Paris… Au 94 de la rue Jean-Pierre Timbaud, en face d’une école et devant un petit square, une façade intrigue. Sur le portail, une lyre en fer forgé renvoie à l’histoire du lieu et à ses origines : une manufacture d’instruments à vent. Plus haut, un blason rouge et or porte les inscriptions « CGT-US Métaux ».
Enfin, un fanion à la ligne moderne et épurée donne une troisième clé : « La maison des métallos ». Ces trois indices sont accompagnés d’une myriade d’affiches, de la création musicale de Jean-Louis Mechali au Forum social local, de Fatma, pièce mise en scène par Salima Kheloufi, à l’appel de la LCR à la grève générale.
Un passé syndical
Attiré par cet affichage bigarré, on entre. L’aile droite de la Maison des métallos est occupée par la CGT, témoin d’une activité syndicale autrefois bouillonnante. En 1936, en pleine effervescence du Front populaire, la manufacture d’instruments à vent fut en effet rachetée par l’Union fraternelle des métallurgistes, une branche de la CGT. La Maison des métallos devient alors un haut lieu de combat syndical ainsi que le refuge des habitants du quartier. Les fêtes alternent avec les meetings, et c’est dans ces salles qu’est enseignée la pratique pionnière de l’accouchement sans douleur.
En 1995, la crise syndicale pousse la CGT à mettre une partie du bâtiment en vente. Alors que le lieu semblait destiné aux promoteurs, les associations de l’Est parisien se mobilisent et créent un « Comité des métallos ». Pétitions, manifestations et appels aux responsables politiques se multiplient.
La Maison est finalement rachetée par la Mairie de Paris en juillet 2001. Sauvée par les pouvoirs publics, elle est convertie en lieu de vie culturelle, sociale et associative. « Aujourd’hui, notre principale mission est d’agir pour que les « zazas » (les habitants et les associations) participent à la vie de la Maison des Métallos », explique Thomas Le Roux, président du Comité des métallos.
Un programme haut en couleur
Dans l’aile gauche du bâtiment, plus défraîchie, on rencontre l’équipe affairée de Planète Emergences. Cette association est chargée de l’animation du lieu jusqu’à sa réhabilitation définitive prévue pour fin 2005. Elle travaille autour de quatre axes : la création artistique, les échanges de savoir et les débats publics, un chantier numérique et une ouverture sur le quartier.
Son instigateur, Gérard Paquet, ancien directeur du théâtre de Châteauvallon (Var) et victime du Front national sitôt l’accession de ce dernier à la mairie de Toulon, a donné à ce projet le titre : « Récits pour un monde possible ». « Dans un monde en pleine mutation, en quête de repères, dans un quartier qui est en soi une petite planète, des récits anciens et actuels, des histoires des quatre coins du monde, proposés à tous, seront notre fil conducteur … », écrit-il.
« Tout est à inventer. Ce que l’on essaie de faire n’existe pas ailleurs », renchérit Vincent Stevance, coordinateur artistique. C’est une équipe d’une douzaine de personnes qui se démène pour concevoir, élaborer et organiser les activités naissantes. C’est aussi elle qui s’occupe de l’accueil et du ménage…
Une effervescence qui porte ses fruits : le programme qu’a concocté Planète Emergences pour l’automne est riche et haut en couleurs. Entre autres, des rendez-vous avec le neuropsychiatre et ethologue Boris Cyrulnik sur le thème des origines, un repas d’Iftar (rupture du jeûne de Ramadan), des ateliers de théâtre et de chorale, un spectacle de danses urbaines de David Llari, des formations destinées au monde associatif…
Des expos aussi. Une fois dans le hall de la salle principale « Lacazette », on est accueilli par les visages et les récits de l’exposition « Terre d’accueil ». Enfin, le « Bar des métallos » qui propose des boissons et une restauration légère, comme son prix, vaut le détour. Sans oublier le cœur de la Maison : la cour intérieure pavée où résonne encore l’histoire du lieu, des bals populaires aux agitations syndicales. Une Maison de rencontres et de convivialité, de mémoire et de création, dont la réalité quotidienne frôle l’utopie.
Contact :
La Maison des métallos
94, rue Jean-Pierre Timbaud
75011 Paris
Métro : Couronnes, Parmentier, Goncourt
Réservations : 01 47 00 68 45
Renseignements : info@maisondesmetallos.org
Site : www.maisondesmetallos.org
Au programme Ateliers A partir du 16 septembre : ateliers de théâtre tous les mardi, jeudi et vendredi, 50 E les 5 séances. A partir du 24 septembre : ateliers de chorale tous les mercredi et vendredi, 80 E par trimestre, 200 E le forfait annuel. Pendant les vacances scolaires : ateliers de hip-hop. A partir du 8 octobre : ateliers de danse chinoise, tous les mercredi, 20 E par trimestre, 50 E le forfait annuel. A partir du 9 septembre : chantier numérique tous les mardi. Spectacles Rendez-vous associatifs Numérique et débats publics |