Tribune du GNIAC (Groupement National des Initiatives et des acteurs citoyens)
Le compte à rebours présidentiel a commencé. Il oscille, à en lire les médias, entre inflation de promesses et flou programmatique. L’essentiel est pourtant ailleurs.
Pour nous (1), qui signons cette tribune, innovateurs associatifs, fonctionnaires impliqués, entrepreneurs d’avenir, financeurs à impact social, développeurs du territoire, acteurs de l’économie sociale et solidaire…c’est la manière de concevoir et de conduire les politiques publiques qui doit changer. Paraphrasant Gandhi nous disons à nos futurs gouvernants : ce que vous ferez pour nous sans nous, vous le ferez contre nous !
Depuis des années droite ou gauche au pouvoir, on ne compte plus les réformes généralisées avant que d’être expérimentées et évaluées (RSA), réalisées trop vite (extension des 35 heures à la fonction publique hospitalière), abandonnées après investissement (écotaxe, coût 1 milliard, manque de recettes 10 milliards) etc.
Va-t-on poursuivre ces méthodes où le secret remplace la concertation, où les citoyens sont vus comme des « bénéficiaires » passifs, les territoires traités en réceptacles de mesures uniformes et descendantes? Depuis 30 ans cette manière de conduire les politiques publiques, héritée des temps monarchiques, du jacobinisme, d’une méfiance structurelle vis à vis de la société civile et des citoyens conduit invariablement à l’échec : les cas les plus douloureux et graves pour notre démocratie étant le chômage de longue durée, le décrochage scolaire et la crise du logement.
Les anciens modes de consultation sont définitivement obsolètes !
La période est trop sérieuse pour sourire de nos travers hexagonaux historiques dans un monde qui bouge vite et se digitalise à la vitesse d’un cheval au galop.
C’est tout simplement notre précieuse démocratie qui est menacée si nous ne changeons pas de logiciel! L’actuel n’est plus adapté aux attentes des citoyens, pas plus qu’à celles de nombreux agents publics, ou à celles des jeunes diplômés. Ceux-ci et ceux-là, formés et informés, veulent participer à l’élaboration de la décision et à sa mise en œuvre. Ils ne sont pas un problème, ils font partie de la solution. Les outils internet et les réseaux sociaux permettent la circulation de l’information en temps réel, l’intervention collective de citoyens, la capacité à lever des fonds pour financer des projets (crowdfunding). Les anciens modes de consultation, tels que les enquêtes publiques par affichage, sont définitivement obsolètes! Deux diplômés de grandes écoles sur 3 veulent travailler dans l’économie sociale et solidaire pour concilier efficacité et intérêt général et donner un sens à leur engagement professionnel.
Le paradoxe est que la France n’est pas du tout immobile ou sans ressorts. Elle est active et engagée. Sur le terrain, des milliers d’initiatives innovantes se développent, portées par des associations, des entrepreneurs, des collectivités, de simples citoyens, ou des regroupements de ces acteurs en pôles de coopération. Elles inventent des solutions pour insérer des chômeurs, relocaliser des activités économiques, imaginer de nouvelles formes d’emplois, de nouvelles solidarités de proximité, recycler des déchets, permettre une économie collaborative solidaire, accompagner les décrocheurs, réinventer des relations intergénérationnelles, permettre la mobilité de tous…
Pour réussir, elles s’efforcent de casser les organisations en silos, d’organiser de nouvelles formes de collaborations public/privé/associatif, de favoriser l’implication de la société civile (par le tutorat, le service civique, l’accompagnement des plus fragiles) sans oublier de mettre en place la mesure de leurs impacts.
Il faut maintenant que ce vaste laboratoire de solutions, inspire les politiques publiques à venir, dans un processus de co-construction.
Ce n’est pas d’abord d’un supplément d’âme dont il s’agit mais d’un enjeu d’efficience collective : nous, signataires de cette tribune, ne sommes pas des idéologues, des « diseux », mais des « faiseux » préoccupés de donner du sens et des résultats à nos engagements.
Nous demandons donc que soit vite organisé un véritable droit à l’expérimentation, que soit mise en place systématiquement une participation des usagers aux programmes publics, que des financements consistants soient affectés à la duplication des innovations organisationnelles et sociales, que les fonctionnaires soient formés à l’innovation participative, que des méthodes collaboratives d’évaluation soient généralisées.
Nous proposons de transformer l’action publique en action de soutien aux initiatives : pause de fabrication de nouvelles normes pendant un an, fonds citoyen doté de plusieurs centaines de millions, enveloppes globales de crédits d’Etat par département, appels à manifestions d’intérêt plutôt qu’appels d’offres, affectation dans les territoires de 30 % des fonctionnaires d’administration centrale.
C’est une nouvelle démocratie active et contributive, qu’il faut impérativement inventer, permettant la participation effective des territoires et des citoyens, substituant le « bottom up » au « top down », introduisant la thématique des biens communs, revisitant la notion d’intérêt général.
Mesdames et messieurs les candidats autant que de mesures nous attendons votre discours de la méthode!
(1) Regroupés dans le réseau GNIAC, Groupement National des Initiatives et Acteurs Citoyens.www.gniac.fr
Premiers signataires tribune Changer le mode de construction des politiques publiques, vite! (au 22/01/2017)
Thierry du Bouetiez, Hugues Sibille, Christian Sautter, Claude Alphandery, Jean-Michel Thornary, Danielle Desguées Chantal Monvois, Marie José Bernardot, , Thibaud Guilluy, Sylvie Feucher, Alain Régnier, Patricia Charrier, Philippe Bertrand,Tarik Ghezali, Sylvie Badoux, Charles-Benoit Heidsieck, Brigitte Baccaïni, Mohamed Gnabaly, Stéphane Vincent, Frédéric Tiberghien, Maxime de Rostolan,
Anne-Céline Ribadeau-Dumas, François Dechy, Fella Imalhayene, Patrick Dugard, Françoise Bernon, Fréderic Bardeau, Etienne Butzbach, Othmane Khaoua, Sylvie Saget, Jean Maillet, Ségolène de Montgolfier, Patrice Bony, Angélique Rose, André Jaunay, Anne Charpy, Ahmed Bouzouaid, Charlotte Debray, Gilles Verdure, Cécile Nonin, Adel Nedja, Denis Sabardine, Lakdar Kherfi, Olivier Gilbert, Cecile Dublanche,
Philippe Archias, Baptiste Gapenne, Benjamin Blavier, Jean-Michel Pasquier, Paul Landowski, Jean-Christophe Blancand, Denis Pansu, Franck Drapin, Vincent Farjon, Jérôme Oddon, Eric de la Paillone Sébastien Pouet-Goffard,Majid El Jarroudi, Jacques Dughera, Judicael Benet, Ali Jiar, Guillaume Desmoulins, Denis Bouclon, Dominique Legoff-Garnier, Samia Kemiche, Olivier Haertig, Gerard Afanou, Jean-Claude Ester, Yan de Kerorguen
Michel Offredo, Ericka Cogne, Antoine Heron, Patrick Beauvillard, Benoit Willot, Nicolas Proust, Vincent Gaillot, Armand Rosenberg, Seven Bertal, François-Marie Lemoine, Benoit Landau , Etienne Kalalo, Damien Desjonqueres, Laure Cardinal, Jocelyne Quaranta , Eric Lenoir, Marc Laget,, Sylvain Lebon (83)