Logement : l’urgence sociale prioritaire
La crise du logement persiste et signe. Avec le froid de l’hiver, elle fait chaque jour de nouvelles victimes. La Fondation Abbé Pierre vient de lancer une campagne nationale d’affichage pour dénoncer la situation de près de 600.000 enfants qui, en France, sont sans domicile fixe.
Les chiffres sont indécents. Il y a en France plus 18.000 SDF et plus de 2.000 personnes vivant dans des « habitats de fortune (cabane, construction provisoire) ». 1,3 millions de Français vivent dans un logement insalubre. 500 000 ménages sont victimes d’impayés de loyers. 10 millions de personnes sont touchées par la crise du logement. Se loger est devenu une véritable gageure. Quant aux étudiants, qui connaissent une précarité croissante, c’est la croix et la galère pour trouver des tarifs de loyers acceptables.
Dans son 15e rapport annuel sur le mal-logement en France, paru le 1er février dernier, la Fondation Abbé Pierre met un carton rouge à celles et ceux qui oublient que la priorité du logement ne peut être discutée. En particulier quand il s’agit d’enfants. La Fondation vient ainsi de lancer une campagne nationale d’affichage pour dénoncer la situation de près de 600.000 enfants qui, en France, sont sans domicile fixe, vivent dans des taudis ou encore chez des tiers en situation de surpeuplement. Une situation dont le gouvernement ne semble pas prendre la mesure.
« Alors que la crise sociale accentue la crise du logement, le gouvernement vient de faire confirmer au Sénat, le 16 novembre 2010, la suppression de l’effet rétroactif des aides au logement APL (article 54 du PLFSS). « Ce sont 240 millions d’euros qui seront ainsi économisés sur le dos des locataires les plus fragiles (moins de 1,2 SMIC environ) et les moins informés (ceux qui tardent à remplir leurs demandes d’APL) » relève l’association Jeudi noir. En première ligne une fois de plus : les jeunes bien sûr, et en particulier les étudiants, qui devraient constituer près de la moitié du public touché .
De son côté, l’Observatoire des inégalités constate que les salaires stagnent mais que les prix augmentent, et en particulier ceux du logement. Les Français dépensent beaucoup pour se loger : 25 % de leur budget en moyenne, contre 13 % pour l’alimentation. En quinze ans, le cout de l’habitat a été multiplié par 2,5, soit une hausse bien plus élevée que celle des revenus (multipliés par 1,6 depuis 1995). Le nombre des impayés ne fait que croître. Leur nombre a doublé entre 2002 et 2006, tandis que les expulsions locatives ont augmenté de 50 % d’augmentation depuis 2002.
Une étude du CRÉDOC de février 2010 montre que la hausse des dépenses de logement, de plus en plus mal vécue par nos concitoyens, contribue à entretenir le sentiment de déclassement social: voir s’éloigner la perspective de devenir un jour propriétaire, habiter un logement trop étroit ou en mauvais état, ou avoir l’impression d’y consacrer une part trop importante de son budget, conduisent bien souvent à se sentir appartenir au bas de l’échelle sociale.
Contrairement aux promesses du gouvernement, on ne construit pas assez de logement en France et ceux qu’on construit ne correspondent pas aux besoins sociaux. Il est donc toujours plus difficile d’acquérir un logement aujourd’hui. La faiblesse de la construction depuis vingt-cinq ans a fini par constituer un déficit de 900 000 logements. En outre, la loi SRU (Solidarité et renouvellement urbain) qui instaure le principe des 20% de logements sociaux dans chaque ville n’est respectée que par un très faible nombre de communes. En lieu et place de politique, l’état utilise la manière forte en expulsant les locataires et en vidant les squats. Pourtant, nombre de familles pourraient être logées . Plus de 400 000 logements sont aujourd’hui vacants .
Une situation inacceptable que dénoncent aussi les associations comme les Don Quichotte, la Droit au logement, ou encore Habitat et Humanisme qui luttent aussi pour rendre le cout des logements abordables (encadrement des loyers, augmentation des aides personnelles aux logements, lutte contre la précarité énergétique). Certaines d’entre elles estiment qu’il faudrait imposer sur tout le territoire et dans tout le programme immobilier de plus de 10 logements un quota minimum de 30% de logements à loyers accessibles aux plus modestes.
En outre, une application volontariste de la loi SRU serait déterminante . » Aujourd’hui, les amendes que les villes qui ne veulent pas de « pauvres » doivent payer ne sont pas rédhibitoires. Il suffirait de renforcer les pénalités contre les communes qui ne se conforment pas à leurs obligations en matière de logement social.
Appel aux propriétaires de bien à louer
L’association Habitat et Humanisme lance un appel aux propriétaires de biens à louer dans les grandes agglomérations : « en confiant la gestion de votre logement à l’association, vous agissez activement contre le mal-logement, tout en bénéficiant d’une tranquillité de gestion, d’avantages fiscaux et d’aides à la rénovation » expliquent les responsables. Différentes solutions sont proposées selon la localisation du bien, l’état du logement, la durée envisagée… elles impliquent toutes un loyer inférieur au marché, en contrepartie de garanties et d’avantages.