Education : La France dans la moyenne des pays de l’OCDE
Le programme PISA 2009 qui vérifie le niveau des jeunes collégiens montre que la France a du souci à se faire sur le creusement des inégalités scolaires.
Médiocre !
A consulter la dernière enquête Pisa 2009* qui mesure si le niveau atteint par les jeunes de 15 ans est suffisant, le moins qu’on puisse dire, c’est que le système scolaire français ne brille pas par ses résultats. Décidément l’Education Nationale a du souci à se faire. L’évaluation du niveau des élèves du Collège montre une France très largement devancée par ses homologues des pays développés. Rendue publique mardi 7 décembre, l’enquête PISA 2009 laisse apparaître un pays à peine dans la moyenne des nations de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques).
Interrogé, le ministre de l’Education National Luc Chatel dit recevoir cinq sur cinq le message tout en se satisfaisant du maintien de la France dans la moyenne pour ce qui est des « performances ». Franchement pas de quoi se réjouir. Car la France est tout à fait en queue de liste pour ce qui est des inégalités scolaires. Le système français connait en effet de fortes disparités parmi les élèves. «Elle a perdu 5 points par rapport à la première enquête de 2000 en terme d’égalité des chances. L’écart entre les très bons élèves et les élèves en difficulté augmente alors qu’il diminue dans la plupart des autres pays » précise-t-on à l’OCDE. Pour un pays qui se targue d’avoir pour ambition » l’égalité des chances », ça fait plutôt mauvais effet.
Rentrons dans le détail
En lecture, la France (22e rang sur 65) se situe au même niveau que les Etats-Unis, l’Allemagne, le Royaume-Uni, le Portugal, etc. mais aussi la Suède et le Danemark, des pays scandinaves, réputés performants. Son score est de 496 points contre 493 pour la moyenne des autres pays. Les résultats en lecture n’ont pas beaucoup varié depuis l’enquête 2000, en France (505 points en 2000) comme dans une majorité des pays de l’OCDE. La proportion d’élèves en grande difficulté de compréhension de l’écrit est passée de 15 à 20 % en 2009 ». Et ce malgré l’augmentation des dépenses d’éducation.
En culture mathématique (22ème rang), la France se situe dans la moyenne des pays de l’OCDE avec un score de 497 points (la moyenne des pays de l’OCDE est de 496 points). Cependant, les élèves de 15 ans ont vu en France leurs performances en culture mathématique diminuer de 14 points entre PISA 2003 (511 points) et PISA 2009 (497 points), ce qui a fait passer la France en 6 ans du groupe des pays les plus performants au groupe dont la performance est équivalente à la moyenne de l’OCDE.
En science, la France (27e rang) obtient un score moyen de 498 points. Shanghai-Chine (575 points), la Finlande (554 points) et Hong Kong (549) surclassent tous les autres pays. La moyenne des pays de l’OCDE est de 501 points. Les Etats-Unis réussissent mieux que nous en lecture et en sciences. Quant à l’Allemagne, derrière nous il y a dix ans, elle s’est ressaisie et nous passe devant en lecture, en sciences et aussi en mathématiques
Selon Bernard Hugonnier, directeur adjoint à l’éducation de l’OCDE, «en France les politiques de l’éducation pour les jeunes n’ont pas été efficaces». Les pays qui obtiennent les meilleurs résultats ( Canada, Japon, Finlande, Suède …) ont le plus souvent mené des stratégies actives de lutte contre la difficulté scolaire, passant par un soutien systématique, par un tronc commun de longue durée, et par un financement privilégié de l’école primaire.
Autre problème, le déterminisme social.
Comparée aux autres pays européens, la France est un des pays dans lequel l’origine sociale influence le plus les résultats scolaires. C’est également le pays dans lequel l’emprise du diplôme sur la position sociale et le devenir professionnel est le plus fort. Les diverses caractéristiques du milieu familial expliquent 28 % de la variation dans les performances. Ainsi l’écart des résultats entre les élèves de statuts favorisés et défavorisés est important. Il est de l’ordre du double de celui du Japon, du Canada, ou de la Finlande.
A l’évidence, c’est tout le système d’éducation qu’il faut revoir. Aussi bien, le système de notation qui est vécu comme une sanction, le redoublement qui ne sert à rien, ou le travail en équipe qui est inexistant. Chacun pour soi. Du coup les élèves français sont les plus anxieux au monde.
La crainte du déclassement
Si le collège connait des problèmes, l’université en connait d’autres. La France se distingue par son retard en termes de qualité des investissements. C’est l’un des très rares pays au monde où l’on dépense moins pour les étudiants que pour les collégiens et lycéens. A la différence de leurs homologues des pays scandinaves où dès l’âge de 18 ans, on leur ouvre des droits (financement des études, couverture chômage..) pour poursuivre les études dans des conditions normales. Résultats : les jeunes scandinaves possèdent une forte confiance dans l’avenir et le taux de chômage est bas.
C’est tout le contraire en France où le chômage atteint des sommets (24%). Cette relégation sociale de l’université française n’est pas une fatalité, mais l’expression d’une forme d’élitisme sans doute assez particulière à notre pays. Elle s’explique, entre autres, par le fait que les élites françaises sont exclusivement issues du système des (très) grandes écoles et n’arrivent pas à faire de la question universitaire une priorité.
Le plus inquiétant est la question du déclassement social. Dans la France des années 2000, connaître une moins bonne réussite sociale que ses parents n’est plus exceptionnel. En cause: l’évolution de la structure des emplois qui n’a pas suivi celle des diplômes, marquée par la massification de l’enseignement supérieur. Nombre de diplômes sont donc victimes d’un double déclassement: scolaire d’abord, car ils ont un niveau de formation supérieur à celui requis pour l’emploi qu’ils occupent ; social ensuite car ils n’ont pas maintenu la position de leurs parents, quand bien même ils ont un cursus scolaire plus brillant.
De ce décalage entre la formation et la mobilité sociale naît un intense sentiment de frustration. Les jeunes ont le sentiment d’avoir été trompés par le système scolaire et cette déception n’est pas sans effets sur l’école elle-même. Comme le niveau de diplôme s’élève au fil des générations et que parallèlement la précarité économique de la jeunesse s’accroît, c’est souvent la valeur des diplômes qui est en question. Après des études sensiblement plus longues que les générations précédentes, la durée de l’insertion sur le marché du travail s’allonge également jusqu’à la difficile obtention d’un contrat à durée indéterminée, en moyenne à plus de 28 ans.
La jeunesse se retrouve ainsi au cœur des problématiques qui pèsent sur ses perspectives d’évolution. Dans un contexte de persistance du chômage de masse, de précarité de l’emploi, de progression de la pauvreté, et de l’exclusion, l’efficacité du système éducatif et l’intégration des nouveaux entrants dans le marché du travail représentent des enjeux cruciaux. Ces enjeux devraient être au centre des préoccupations des hommes politiques qui s’apprêtent à partir en campagne.
* Le programme PISA ?
Tous les trois ans depuis l’an 2000, l’OCDE compare ce que savent faire les jeunes de 15 ans dans leur langue maternelle, en mathématiques et en sciences. Il ne mesure pas l’acquisition de programmes scolaires mais vérifie dans quelle mesure les élèves qui arrivent au terme de la scolarité obligatoire ont acquis les savoirs et savoir faire indispensables pour participer pleinement à la société de la connaissance. L’édition 2010 est d’autant plus importante qu’elle montre l’évolution des systèmes sur dix ans. Le programme est réalisé tous les trois ans sur un échantillon représentant 26 millions de jeunes scolarisés dans 65 pays, qui représentent 90% de l’économie mondiale.