Protection sociale en Europe
Depuis dix ans, tout le monde convient, à gauche comme à droite, de l’impératif prioritaire d’une dynamique de croissance pour lutter contre le chômage. Avant, le clivage était net : pour la gauche, la protection sociale était un amortisseur de crise. Pour la droite, il fallait limiter les dépenses sociales. La gauche a finalement repris cette question à son compte. Aujourd’hui, la plupart des gouvernements de l’Europe, en majorité de gauche, ont reformaté leur politique de l’emploi selon une logique d’incitation à la reprise d’activité. Les dispositifs d’assurance chômage, dans un contexte de retour durable à la croissance et de la création d’emploi, pratiquent cette évidence.
Selon Pascal Beau, président de l’Observatoire européen de la protection sociale » la protection sociale en Europe est toute entière traversée par la question du vieillissement des populations. Le débat sur la retraite illustre cet état de fait. Peu importe la nature du système utiliser : capitalisation ou pas, la question est surtout de savoir quelle part la collectivité accepte-t-elle de consacrer et le retour qu’elle peut en tirer ? » Cette question en croise une autre : la relance de la natalité. Des évaluations montrent que la montée du nombre d’actifs s’établira en 2010 à 183 millions. Et les projections pour 2050 parlent d’une perte de 33 millions d’actifs. C’est l’équivalent de la population de l’ex-Allemagne fédérale.
Quelle réponse politique apporter à ce phénomène ? Faut-il aller vers la compensation des risques ou bien oeuvrer dans le sens d’une dynamique économique ? Dans la sociale démocratie scandinave, il y a une tradition de redistribution des fondamentaux. Cela s’explique par : 1. dans une tradition de l’état providence de refus du chômage. 2 . Ce sont des petites nations, le taux d’efficacité est plus élevé. Aux Pays Bas, le partage du travail, l’emploi à temps partiel sont intégrés dans une logique globale avec un accompagnement social fort pour faciliter, par exemple, le travail des femmes à temps partiel par des aides à la petite enfance et par des investissements dans des équipements collectifs. Le compromis social est plus facile à assurer. » Dans les grands pays comme la France, il y a une tradition de lourdeur due à la centralisation et de méfiance sociale, explique Pascal Beau. On a tendance à théoriser mais on expérimente pas. Dès qu’une idée nouvelle surgit, l’idéologie s’en empare et cela finit par une crise institutionnelle. On pense à 20 ans les conséquences de telle ou telle idée abstraite. Et cela soulève forcément tellement de question qu’on fabrique de l’impuissance à agir concrètement « .
La réforme de l’état est le premier chantier à entreprendre. Le problème n’est pas tant de savoir s’il y a trop ou pas assez d’état que de savoir comment le rendre plus efficace. Il n’y a pas 36 000 manières de faire de l’efficacité. » Deux pays innovent en la matière, soutient Pascal Beau. La Belgique qui a effectué un véritable travail d’introspection sur sa fonction publique en interrogeant les citoyens un par un sur leurs souhaits en matière de service public.. Grâce aux réponses, ils ont reconstruit une méthodologie de correction du service public dans la durée, obligeant les administrations à un management novateur. Même démarche en Italie où la réforme de l’administration prévue par le nouveau pouvoir devrait reposer sur des critères managériaux « ..
Il y a un grand décalage entre les débats et la réalité sur ce chapitre. L’harmonisation n’a jamais été un objectif réel dans les axes européens. Il ne faut pas faire croire qu’on va tout harmoniser. Les différences entre les systèmes de protection sociale sont des handicaps pour les fondamentaux du Traité de Rome que sont la liberté et l’unité. La réponse est oui pour ceux qui circulent dans l’Union européenne. Il faut lever cet obstacle en identifiant les problèmes et en les solutionnant. Actuellement, on coordonne. On choisit le plus petit commun dénominateur. On adapte les systèmes et on verra bien. On s’aperçoit qu’il est très compliqué de faire converger les systèmes. Pour le moment, les ministres s’associent, échangent les bonnes pratiques, parlent de coopération autour de thèmes de travail comme les retraites, les plans nationaux pour l’emploi.