Ludovic Saulnier : des chiffres à la peinture
Retourner sur les bancs de l’école à 30 ans, Ludovic Saulnier l’a fait pour assouvir sa passion : l’art ! Devenu expert en tableaux après un début de carrière dans la comptabilité, Ludovic parle de « reconversion naturelle ». Portrait.
Marié et père de deux petites filles, Ludovic Saulnier, 30 ans, comptable, avait tout pour être heureux. Mais, il y a de cela plus de dix ans, il laisse comptes et bilans derrière lui et se lance dans toute autre chose…
Ludovic est aujourd’hui expert en tableaux du XIXème siècle à nos jours. « C’est un métier où on ne se cantonne pas à des tâches précises ou routinières. Mon activité principale est d’expertiser, d’authentifier et d’estimer des œuvres picturales ; je délivre alors un certificat d’authenticité, si le tableau s’avère être un vrai, ou une description et estimation pour la revente. Je travaille pour des particuliers, des marchands, des Commissaires priseurs, mais également pour les assurances ; ponctuellement, j’organise des ventes aux enchères », décrit Ludovic.
Ayant « fait le tour » de la comptabilité, il a donc troqué les chiffres pour les tableaux. Pas si étonnant quand on l’écoute parler de ses « balades » dans les couloirs du Louvre, de Cluny, et biens d’autres musées encore. « Ma mère m’y accompagnait tous les week-ends, j’étais curieux de tout, ne sachant où donner de la tête ! J’habitais à Paris, je n’aurais donc pas pu rêver meilleur endroit, il y a toujours quelque chose de nouveau à découvrir ! »
Ludovic se passionne pour l’histoire, sa matière préférée à l’école, et avoue avoir voulu pendant longtemps devenir archéologue. Sa reconversion était donc « naturelle » pour lui qui veut évoluer dans un milieu qui le passionne. Son entourage, quoiqu’un peu étonné, l’a soutenu et encouragé, surtout sa femme. « Elle souhaitait que je m’épanouisse, que j’aille au bout de mon projet », confie Ludovic.
Tout en continuant à exercer la comptabilité pour ramener un salaire, il suit pendant deux ans des cours aux Beaux-Arts (ENSBA) et aux Arts et Métiers (ENSAM), l’après-midi ou le soir, puis, pour deux années encore, un enseignement à l’École du Louvre. A force de rigueur et de détermination, il réussit à faire d’une passion son métier ; métier dans lequel il s’est fait un nom et est reconnu par l’Alliance européenne des experts.
Stress et étincelle
Son expérience lui a cependant appris qu’il y a une différence entre apprendre un travail et l’exercer quotidiennement. « Je suis moins passionné qu’avant », confie Ludovic, qui ne cache pas que son activité est stressante et assez ingrate, avec une importante charge de travail, et une grosse prise de risques financiers importante. « On n’a pas le droit à l’erreur quand on authentifie un tableau, on engage sa responsabilité juridique pour trente ans ! ».
Les experts en tableaux sont, par ailleurs, peu reconnus et souvent critiqués. « Il nous faut être juge et partie à la fois, et lorsque nous annonçons à un client qu’un tableau est un faux, c’est dur à gérer et à accepter ». Reste, Ludovic a encore cette étincelle dans les yeux quand il parle de son métier et pourrait en discuter pendant des heures ; il s’est donné les moyens d’y arriver, et « heureusement, ça a porté ses fruits » dit-il, soulagé. Car, si ses démarches n’avaient pas abouti, il serait certainement revenu à la comptabilité. « Il fallait bien manger ! », poursuit Ludovic qui bien que déçu, aurait vécu dans le regret, se répétant : « j’aurai pu faire… « .
Améliorer le quotidien
Aujourd’hui, il est difficile pour Ludovic Saulnier de faire des projets, car la situation économique a une répercussion incontestable sur son activité. Et pour étendre son champ d’action, évoluer, ouvrir une galerie, investir dans des œuvres, trouver des tableaux importants, il faut des fonds. Ludovic peut tout de même se féliciter d’avoir travaillé avec des artistes tels que Marie-Paule Deville-Chabrolle (Laetitia Casta en Marianne, c’est elle), Bruning (graveur allemand), Jacqueline Gougis (peintre pointilliste), J-M Robbé (peintre seine-et-marnais), et écrit un mémoire : « Emile Bernard, chef de file de l’école bretonne ».
Ludovic travaille actuellement à l’écriture d’un ouvrage sur l’expressionnisme allemand, ainsi qu’à la réalisation d’un catalogue raisonné (répertoire des œuvres d’un artiste) des peintres Bouvard, sur trois générations. Ce travail prendra plusieurs années.
S’il a un conseil à donner à une personne, qui comme lui et quelques autres, décide de se reconvertir, c’est « de foncer » à condition d’être aidé, soutenu par ses proches. Le jeu en vaut, en effet, la chandelle : « Se sentir bien dans sa vie professionnelle permet d’être plus engagé, plus productif et notre vie personnelle n’en est que meilleure. Trop de gens se lèvent le matin avec une seule idée en tête, finir au plus vite leur journée ! Alors, ne laissons pas passer l’opportunité d’améliorer notre quotidien, donnons nous la peine d’y parvenir ».
En savoir plus :
Ecole du Louvre – Palais du Louvre
Porte Jaujard
Place du Carroussel
75038 Paris Cedex 01
Tél. :01 55 35 18 00
Site : www.ecoledulouvre.fr
ENSBA (Ecole nationale supérieure des beaux-arts)
14, rue Bonaparte
75006 Paris
Tél. : 01 47 03 50 00
Site : www.ensba.fr
Mail : courspouradultes@ensba.fr
ENSAM (Ecole nationale supérieure d’arts et métiers)
151, bld de l’Hôpital
75013 Paris
Tél. : 01 44 24 62 99
Site : www.ensam.fr