Shopping dans la ville
Dans la ville durable des années à venir, les citadins devront changer leurs habitudes pour faire les courses.
Rouler en voiture deviendra difficile. Depuis quelques années déjà des municipalités comme La Rochelle ou Besançon rivalisent de solutions pour limiter l’usage de l’automobile. Circulation en alternance, couloirs de bus, extension des zones piétonnes, journées sans voitures…les initiatives se multiplient. Alors évidemment la question est sur toutes les lèvres : comment faire ses courses si on n’a plus de voiture ou si on ne peut plus en disposer ?
Pas facile pour les habitants des maisons isolées ou des quartiers sans commerce de se passer de moyens de locomotion pour porter les provisions ou acheminer des biens de consommation courants. Surtout quand le lieu d’habitation est mal desservi par les services de cars publics ou privés. Les urbanistes imaginent pour pallier à ce problème plusiuers types de solutions comme, par exemple, la création de navettes-taxis de « ramassage shopping », de moyenne capacité, pouvant transporter plusieurs personnes à la demande ou à heure fixe. Les véhicules des entreprises publiques de service (La poste, EDF…) pourraient, dans le cadre d’une solution proche du « co-voiturage », contribuer à ce type de services. Les points d’arrêts pourraient être situés sur la place du village ou sur un parking relais. Internet donnerait la possibilité de gérer les circuits en fonction de la demande exprimée.
Justement Internet. Si la toile a tant de succès, c’est qu’elle apporte une partie de la réponse à cet ensemble de contraintes. L’écran télécom dispense de se déplacer. C’est un fait, le commerce en ligne commence à entrer peu à peu dans les habitudes. Il suffit de pianoter sur son ordinateur dans les sites de magasins en ligne. Cela permet non seulement de gagner du temps pour en avoir davantage pour soi, mais c’ela représente aussi un facteur d’économie d’énergie.
Selon une étude comparative de Télémarket mesurant l’impact environnemental entre d’une part les déplacements à l’hypermarché en voiture pour faire ses courses, l’achat près de chez soi et l’achat en ligne avec livraison à domicile, cette dernière solution est la plus écologique. Elle permet de diviser par 8,3 les émissions de CO2 liées aux transports.
Encore plus fort : le frigo qui fait les courses. Dans la maison numérique de demain, c’est le réfrigérateur familial qui aura la charge de faire les emplettes. Le projet belge Living Tomorrow, a mis au point un prototype de frigo surdoué qui gère en permanence le stock d’aliments. Dès qu’un produit manque, le lecteur de puces RFID contenu dans l’appareil le commande via internet. Mais comme nul n’est parfait, les concepteurs n’ont pas encore trouvé le moyen de dispenser les futurs utilisateurs de la corvée de ranger les paquets que le livreur aura déposé à domicile. Fini de subir la corvée des courses, le frigo fait cela beaucoup mieux que nous.
« Intelligent » le nouveau réfrigérateur a pris les rênes de l’intendance alimentaire. Surdoué, il commande les courses à notre place. Doté d’un lecteur de puces RFID, cette étiquette radio fréquence dont sont équipés tous les produits, il peut au fil des heures gérer ce qu’il y a ou ce qu’il n’ y a plus en stock. Plus de lait, plus yoghourts ou de pâtes fraîches, de jambon, il commande ce qui manque au supermarché le plus proche grâce à sa connexion Internet, et le livreur n’a plus qu’a déposé les courses. Et peut-être qu’un petit robot ménager va nous aider à ranger les fameuses courses…
Certaines marques ont posé des jalons du frigo intelligent par exemple le Screenfridge d’ Arthur Martin Electrolux qui tient un rôle central dans la cuisine. Il enregistre la liste des courses et la transfère sur le téléphone portable de celui qui sera en charge des courses, avec son ordinateur intégré, il se connecte à Internet, gère les courriels et messages vidéo des membres de la famille. Chez Samsung, c’est un réfrigérateur « side by side » équipé d’un écran tactile, alors que LG, propose un « multi media Refrigerator » doté d’un écran à cristaux liquides.
Il ne sera pas non plus nécessaire de sortir pour s’acheter des vêtements car des mannequins virtuels les essayeront à notre place lors qu’on fait notre shopping sur internet. Un avatar – mannequin en 3D à notre taille, avec notre morphologie peut essayer pour nous tout type de vêtements. Déjà proposé par certains vépécistes comme la Redoute ou des enseignes comme H&M , les clientes peuvent faire tourner leur mannequin virtuel de dos, de profil, zoomer sur le produit, changer la couleur ou la taille.
Naturellement, ces scénarios ne seront qu’un des aspects de la réalité du shopping de demain. Car les citadins continueront de sortir faire les magasins. Ces derniers continueront à exister comme des lieux de socialité. Simplement, la palette des possibles – se déplacer ou pas, loin ou près – sera plus variée. Elle se fera dans le sens des économies d’énergies et de moins de pollution.
De nombreuses études le montrent : les magasins de l’avenir seront de plus en plus des magasins de proximité.
L’action 3 du « Grenelle de l’environnement, portant sur la « ville durable » propose ainsi de « revitaliser les centres urbains, en particulier ceux des banlieues et des communes de grande périphérie des agglomérations ». L’objectif est de donner accès à des commerces et services près de chez soi « dans une logique de circuits courts, d’autonomie, de déplacements doux apaisant et de lien social ».
La mise en service de mini-véhicules urbains électriques facilitera ces déplacements sans polluer. Des chercheurs du Massachussets Institute of Technology de Boston (MIT) ont imaginé des voitures-caddies , sortes de véhicules électriques à deux places rétractables. Proposés en self service, ils s’emboîtent à l’arrêt les uns dans les autres, comme des caddies sur le parking des centres commerciaux. L’avantage : un gain de place et une économie d’énergie.
Nombre de scénarii reposent également sur la création de points-relais de livraison par quartier ou à la périphérie permettant la livraison « direct producteur » en véhicule électrique à partir d’un espace logistique situé aux portes des villes. Autre exemple, les magasins logistiques en centre ville pour les stocks des gros distributeurs alimentaires. A partir de ces centres, des fourgonnettes électriques silencieuses peuvent organiser leurs tournées. Des systèmes de consignes automatiques sont également aménagés dans les parkings pour les sociétés de service après-vente, de réparation ou d’articles ménagers. Elles permettent de stocker les pièces et ainsi d’éviter les allers-retours des camionnettes en banlieue.
L’exemple le plus abouti est celui de la ville de La Rochelle qui s’est dotée d’un plan de circulation multimodal, correspondant à une nouvelle organisation des déplacements (promotion des véhicules électriques et des transports alternatifs, augmentation des transports publics…)
Il faudra aussi au commerce de détail opérer une petite révolution : par exemple, mieux connaître le mouvement des clients « Nous avons désormais un outil fantastique pour optimiser le commerce de détail de demain, une sorte de cartographie du mouvement », affirme Mike Hess, directeur de la recherche internationale d’OMD. Avec cette information, l’aménagement des magasins sera revu et corrigé. Les magasins ne seront pas seulement un endroit pour acheter, mais bien un autre endroit pour communiquer avec le consommateur. Une fois dans les rayons, le client sera identifié – homme, femme , jeune , vieux … – par une webcam placée dans un linéaire , qui va étudier comment il se comporte . Une marque peut dresser une cartographie des profils de sa clientèle spécialisés sur certaines promotions.
Les vitrines deviendront elles aussi intelligentes 24heures sur 24 ? Philips travaille sur les concepts des magasins de demain dans son laboratoire de recherche, sur le campus de Eindhoven aux Pays-Bas. Le consommateur passe devant un magasin. Son regard est-il accroché par un objet ? Aussitôt, la vitrine lui donne instantanément les informations relatives à l’article, le prix et la disponibilité. Il peut aussi réserver l’article et venir le chercher quand le magasin est ouvert.
Comment par exemple développer de nouveaux éclairages interactifs qui transforment la « shopping expérience » ? Pour attirer les clients, les magasins n’auront pas besoin de faire sans cesse des travaux, ils vont pouvoir changer d’ambiance en revisitant leur intérieur avec de la lumière. De nouveaux éclairages vont permettre de recréer de façon virtuelle une ambiance feutrée ou multicolore. Le système « LightWand » s’inscrit dans cette tendance. Le commerçant capture la couleur dominante de sa nouvelle gamme d’accessoires au moyen d’un « zappeur » et reproduit d’un clic cette couleur sur les murs ou présentoirs de son magasin. Toutes ces nouvelles applications viendront changer notre façon de faire notre shopping.
Au vu de toutes ces évolutions, les hypermarchés risquent de connaître des temps difficiles. Certains spécialistes pensent que les mammouths de la consommation qui se sont développés avec la massification de la voiture et des systèmes d’accès routiers sont à terme condamnés. Ils ne répondent plus aux services réclamés par les consommateurs, notamment aux abords des métropoles. Difficultés de stationnement dans les parkings, bouchons, queues à la caisse… font que beaucoup de chalands changent leurs habitudes.
Mais la fin des hypermarchés, même si ils subiront la baisse de fréquentation, n’est pas pour demain. Le centre commercial est aussi un lieu de promenade et il le sera encore, tirant vers les loisirs. Ceux qui font du lèche-vitrine verront leur environnement changer au fur et à mesure de leur promenade : les affiches publicitaires s’animeront voire communiqueront avec nous sur le sol ou sur les murs subitement à notre passage, des messages personnalisés nous seront envoyés.
Pour animer une thématique sur les vacances, on marche sur une mer ou dans un désert qui garde la trace de nos pas : …: ce tapis interactif nommé aussi « Living Surface » va sans doute faire partie intégrante de la décoration de nos magasins : tout part d’un projecteur installé au-dessus des visiteurs à côté d’une caméra et d’un capteur infrarouge, qui permet de diffuser des images en 3D qui se modifient au fil de des déplacements.